Conjurer le sort
Le froid est encore là, mais l'air qui plane au-dessus des toits dès le matin m'angoisse. J'aimerais lutter contre le ciel bleu clair et le soleil qui m'envahissent les yeux, mais comment ? Le printemps est déjà en marche, ses valises remplies de pâquerettes, de cette joie que je ne comprends pas, de projets que l'on entendra bientôt de la bouche des passagers du métro, des commerçants, des voisins. "La chaleur revient, c'est agréable !" Non. Pas pour tout le monde. La terre qui renaît, les oiseaux qui chantent et la neige que j'attendrai des mois, ou des années. Les manteaux et souliers que j'aime tant traîneront des pieds pour rester encore-un-peu à ma portée. Je les porterai, j'aurai trop chaud, je m'énerverai. Je serai de mauvaise humeur chaque jour, jusqu'à la rentrée de septembre. Celle qui sent bon les jours heureux et la nouveauté. Celle qui sent la maison et l'envie de réussir. Au revoir frimas, bonjour rosiers en fleurs. Je m'adapterai, je ferai semblant. Je mettrai un peu de couleur là où le soleil aura tout effacé. Avec de la patience, je serai en vie à la fin de l'été.